open
Specialisten Dr. Krygier
Choose your language

Specialisten Dr. Krygier

Les spécialistes en parlent

Dr. Krygier banner image
Dr. Krygier round image
Dr Krygier
Dr Krygier : « Le psoriasis génital n’est pas sexuellement transmissible, mais parlez-en »

Le psoriasis peut se déclarer sur à peu près toutes les parties du corps, dont les plus intimes. La problématique qui en découle est complexe. D’une part, les patients souffrant de lésions génitales seront moins à l’aise dans leur sexualité tant au niveau physique que psychologique. D’autre part, ils n’en parleront pas facilement au médecin, ce qui empêche parfois une prise en charge correcte des symptômes. Résultat : un cercle vicieux qui peut même mener jusqu’à la dépression. Heureusement, un nombre croissant de spécialistes, comme le Dr. Jonathan Krygier, dermatologue à l’hôpital Saint-Pierre à Bruxelles, s’intéressent à la question.

Dr. Krygier, en tant que dermatologue, vous êtes spécialisé dans les maladies des muqueuses, les maladies sexuellement transmissibles et le psoriasis. Vous voyez donc souvent des patients souffrant d’un psoriasis génital ?

Oui, mais c’est sans doute lié au fait que je travaille un jour par semaine au tout nouveau centre MIA (dédié aux maladies infectieuses dont les maladies sexuellement transmissibles) de l’hôpital Saint-Pierre à Bruxelles. J’y vois donc souvent des patients avec des maladies des muqueuses qu’ils pensent être potentiellement sexuellement transmises, alors que le psoriasis génital ne l’est pas. Au-delà, je pense que c’est une partie de la pathologie qui est mal connue, sous-diagnostiquée et sous-traitée, même si le psoriasis est une maladie fréquente en dermatologie et l’on estime qu’un patient sur trois avec du psoriasis connu sur le corps aura, un jour, une atteinte génitale.

Pourtant, les patients n’en font pas souvent état, encore moins pendant les premières consultations. Il faut qu’un climat de confiance s’installe, et encore même parfois cela ne suffit pas. De plus, certains patients hésiteront à aborder cette question si le médecin n’est pas du même sexe.

Y a-t-il une différence entre les hommes et les femmes en matière de psoriasis génital ?

Non, pas en matière de prévalence (de fréquence, donc). Il y a toutefois une différence majeure dont il faut tenir compte : le psoriasis est une maladie qui ne touche pas les muqueuses – c’est-à-dire les zones de peau très fines. Ces zones-là – comme l’intérieur de l’anus, l’intérieur de la bouche ou du vagin etc. – ne sont jamais atteintes de psoriasis.

La peau et les semi-muqueuses (comme le prépuce et le gland chez l’homme) en revanche peuvent être atteintes. Cela implique la présence potentielle de psoriasis au sein même de l’organe masculin. Ce n’est pas le cas chez la femme, chez qui le psoriasis ne peut pas être présent à l’intérieur du vagin, mais bien autour sur la vulve ou autour du vagin.

Dans les deux cas toutefois, la gêne peut être importante.

Au niveau de la sexualité, cette différence peut avoir un impact. Lequel ?

Pour les hommes il y a tout d’abord l’aspect fonctionnel : le sexe entier peut être atteint de psoriasis, ce qui entrave l’acte sexuel, jusqu’à le rendre carrément impossible (pensez douleur, prurit, déchirement, etc.). Chez la femme, le psoriasis ne touche jamais les muqueuses internes, mais l’atteinte externe de l’organe peut toutefois être très gênante et rendre la sexualité très inconfortable.

Cependant, la honte et la gêne ressenties sont identiques pour les deux sexes. A cause de l’aspect visuel, bien sûr, mais aussi à cause de la crainte que leur partenaire interprète le psoriasis comme une maladie sexuellement transmissible. Ce qui, soyons clair et je ne le répéterai jamais assez, est complètement aberrant. Le psoriasis n’est pas une maladie sexuellement transmissible et il n’est pas contagieux.

Les traitements utilisés pour le psoriasis génital sont-ils les mêmes que pour les autres formes ?

Oui, en gros, mais pas entièrement. Comme vous savez, les traitements biologiques ne sont accessibles qu’aux patients qui ont une surface atteinte de peau de minimum 10%. Or, je rencontre souvent des patients qui ont une atteinte génitale majeure, mais peu de lésions annexes. La même difficulté se présente avec les patients souffrant surtout d’un psoriasis des ongles, du cuir chevelu ou palmo-plantaire. Ce sont devenus les psoriasis les plus difficiles à gérer, parce que la surface atteinte ne représente pas 10% de la peau et que le traitement n’est dès lors pas remboursable. Heureusement, il y a une lumière au bout du tunnel : de nos jours se développent des traitements spécifiquement pour ces patients-là et la sécurité sociale prend de plus en plus la qualité de vie en compte pour déterminer si un patient a droit à certains autres traitements systémiques.

C’est assez récent, mais c’est un changement majeur, tant au niveau des résultats qu’au niveau psychologique pour les patients. Je le dis donc au début de chaque consultation.

Pour pouvoir traiter efficacement les lésions génitales, vous devez d’abord savoir bien sûr que le patient en face de vous en souffre. Comme nous avons évoqué en début d’entretien, c’est tout sauf évident.

En effet. Ce qui aide, dans mon cas, c’est le fait que je la consultation où je travaille est spécialisée en maladies génitales. Cela met les patients en confiance, parce qu’ils savent qu’ils ne seront pas jugés et que le médecin – en l’occurrence moi - est préparé à parler de la pathologie aux endroits intimes et de sexualité.

Dès le début, je vais essayer d’orienter la discussion sur les aspects génitaux et sexuels. Et je tiens à souligner que le choix des paroles en la matière est important. Le langage a évolué aussi pour devenir plus respectueux, le tout dans l’objectif d’arriver à un diagnostic précis et correct afin de pouvoir proposer le traitement adapté.

Que diriez-vous aux patients qui n’osent pas parler de leur psoriasis génital ?

Le suivi est important et il faut un climat de confiance. Parlez donc à votre dermatologue, mais suivez votre instinct. N’hésitez pas à demander un second avis pour vous rassurez. Sachez aussi que l’approche thérapeutique a beaucoup évolué : il y a en général une solution.

Auriez-vous des conseils aux partenaires de personnes confrontées au psoriasis génital ?

Tout d’abord, rappelez-vous qu’il ne s’agit pas d’une maladie contagieuse. Ensuite, soyez compréhensif et patient. Au-delà du sentiment de honte qu’il éprouve, votre partenaire s’il est en crise psoriasique peut-être ne sera physiquement pas capable d’assurer un rapport sexuel. N’oubliez pas d’être indulgent aussi et de faire preuve d’empathie.

Je voudrais terminer avec une mise en garde très importante. Même si le psoriasis génital n’est pas une maladie sexuelle transmissible, il ouvre toutefois la porte aux IST (infections sexuellement transmissibles, ndlr), puisque les lésions sont des brèches cutanées qui permettent aux autres maladies de pénétrer plus facilement l’organisme. Le préservatif est donc d’autant plus important avec un partenaire occasionnel.

Mon message principal toutefois, c’est de ne pas perdre espoir. Certes, le psoriasis est une maladie chronique et le chemin entre le premier diagnostic et la disparition des symptômes et parfois très long, mais des traitements efficaces et accessibles existent.