En tant que spécialiste et personne de confiance, le dermatologue accompagne la plupart des personnes atteintes de psoriasis durant de nombreuses années. Il joue dès lors un rôle clé dans le traitement de la maladie et dans l’identification d’éventuelles comorbidités, inscrivant la thérapie dans une approche globale, comme l’explique la dermatologue Géraldine Titeca, chef de service et spécialiste en psycho-dermatologie à la clinique Notre-Dame-de-Grâce à Gosselies.
En général, les patients qui arrivent chez moi connaissent déjà leur diagnostic, soit par leur médecin de famille, soit parce qu’il y a des antécédents familiaux ou parce qu’ils ont fait des recherches sur internet. Il y a toutefois des exceptions et il m’arrive de recevoir des personnes qui ne connaissent pas leur diagnostic.
Lors de la première consultation, je laisse d’abord parler les patients : dans de nombreux cas, ils ont besoin de raconter leur vécu. Cette première écoute attentive les met en confiance.
Ensuite, j’essaie de ne pas les bombarder immédiatement de toutes sortes d’informations. Je commence par déblayer le terrain en expliquant les causes connues du psoriasis et les facteurs déclenchants. Puis je détaille les différents types de traitements locaux et systémiques, leur fonctionnement et les conditions dans lesquelles ils se prescrivent.
Je procède également à l’examen physique et je vérifie la présence éventuelle d’autres pathologies liées au psoriasis, comme l’arthrite, les maladies cardiovasculaires ou les troubles métaboliques, ainsi que les troubles hépatiques ou encore le diabète. Afin de bien identifier les éventuelles comorbidités, je prescris une prise de sang dans laquelle je réalise un screening de base (pour contrôler le cholestérol, la glycémie, la fonction hépatique, rénale…).
Si nécessaire, je suggère la consultation d’un spécialiste dédié. Par ailleurs, le suivi par un diététicien peut aussi être indiqué dans l’adoption d’une meilleure hygiène de vie, tout comme l’aide d’un psychothérapeute peut s’avérer précieux notamment pour se libérer d’assuétudes comme le tabagisme et l’alcool, mais également pour les épauler s’il y avait des troubles psychologiques (dépression, anxiété, …). Au fil des années, j’ai constitué un petit réseau de professionnels en qui j’ai confiance et avec qui je collabore.
Il est important de partir du vécu du patient et, en fonction de différents facteurs comme la sévérité du psoriasis, les comorbidités, les interactions médicamenteuses, les croyances du patient, … et de respecter la balance entre les risques et les bénéfices des différents traitements. J’essaie toujours d’agir en « bonne mère de famille ».
Il est également essentiel de conclure une alliance avec le patient, pour pouvoir le prendre en charge dans sa globalité, en lui expliquant qu’il est important de le traiter mais qu’il est également recommandé faire de l’exercice, de perdre du poids ou d’arrêter de fumer, etc. J’estime que chaque « négociation » constitue une petite victoire et s’inscrit dans une prise en charge multidisciplinaire dont le dermatologue constitue le pivot. C’est très gratifiant de pouvoir jouer ce rôle clé.
Oui, tout à fait. Ce n’est pas toujours le cas mais les problèmes psychologiques sont fréquemment associés. Le risque semble être important chez les adolescents. Il faut aussi savoir que la sévérité clinique ne correspond pas forcément à l’impact psychologique. Le psoriasis et ses symptômes peuvent peser plus ou moins lourdement sur le quotidien des patients, provoquant différents troubles, qui peuvent aller jusqu’à la dépression.
C’est pourquoi, dans un deuxième temps, j’examine aussi leur profil psychologique, en analysant le rôle du stress et d’autres facteurs émotionnels (comme un deuil ou des problèmes de couple). J’essaie de parler de l’impact du psoriasis sur le quotidien du patient, de voir dans quelle mesure la maladie et ses symptômes le freinent dans ses contacts sociaux et/ou sa vie intime.
Ce n’est pas un sujet dont les patients parlent d’eux-mêmes – c’est encore un domaine tabou, je pense - et pourtant il est important à aborder. Donc je pose la question, tout simplement : « Votre psoriasis vous provoque-t-il des difficultés sexuelles avec votre partenaire ? » Souvent, il y a une souffrance à ce niveau : les patients se sentent sales, souffrent du regard des autres, ont peur d’être repoussés, surtout chez les jeunes. Je pense qu’informer le grand public sur le fait que le psoriasis n’est pas une maladie honteuse ou encore une maladie contagieuse pourrait peut-être les réconforter, les rassurer, les mettre plus à l’aise. Le fait de pouvoir en parler constitue un soulagement pour de nombreux patients. Il faut toutefois respecter le désir du patient s’il ne souhaite pas aborder ces questions intimes.
En effet, il faut que chaque personne trouve la thérapie qui lui convient. C’est pourquoi le traitement doit être adapté chez chaque patient en fonction de nombreux facteurs, on va lui « tailler un traitement sur mesure ». À ce niveau aussi, la relation de confiance entre le dermatologue et son patient est capitale.
C’est peut-être cela qui rend mon métier unique. Dans
la plupart des cas, je peux accompagner mes patients
à trouver le traitement qui changera leur vie. Nombre
d’entre eux affirment qu’il y a un avant et après. Les
possibilités sont beaucoup plus étendues qu’auparavant
et je tire beaucoup de satisfaction à pouvoir contribuer
à ce processus global qui permet d’améliorer la vie
de mes patients.
Ne restez surtout pas dans votre coin, il y a une avancée
terrible dans le la prise en charge du psoriasis. Le
dermatologue est là pour vous informer et vous aider.
Il tiendra compte de vos besoins particuliers. Ne
désespérez donc pas, mais prenez-vous en main, car
un traitement réussi peut vous changer la vie.
S’attaquer au Pso & à l'APs
Pso et la sexualité
Une interview croisée concernant le parcours du traitement du psoriasis